Révolutions numérique et industries culturelles

20  octobre 2005 | par Rédaction Transversales

Philippe Chantepie et Alain Le Diberder , La découverte, 2005.

Le livre de Philippe Chantepie et Alain Le Diberder aborde le thème cher à Transversales de la révolution informationnelle sous un angle inédit dans nos colonnes : celui de l’économie et de l’avenir des industries culturelles.

On peut regretter une approche réductrice - la culture ramenée à ses industries - qui tronque le débat à la racine en écartant les échanges culturels non économiques qui se tissent dans la société de l’information. Dans cette épure, les auteurs font cependant un travail d’analyse caractérisé par une connaissance à la fois intime et lucide de ces industries.

Leur travail couvre tout à la fois les industries du cinéma, de la musique, du jeu, de la télévision, mais s’élargit également aux télécommunications, au monde du logiciel etc, qui par le biais de mouvement de concentrations, d’intégration de filières et de diversification de leurs offres tendent à se rapprocher des premiers. Après un rapide tour d’horizon des changements techniques qui conditionnent le paysage dans lequel évoluent ces industries, les auteurs analysent dans le détail l’impact économique du numérique à la fois sur les modes de production et de distribution. Sur le premier volet, celui de la production, ils concluent à un changement relativement lent : les formidables gains de productivité générés par l’arrivée du numérique sont contrebalancés par des coûts de commercialisation accrus et une exacerbation de la concurrence. A moyen terme cependant, la donne pourrait se transformer avec l’abaissement des barrières à l’entrée dans la création et la basculement dans ce que l’on appelle désormais « l’économie de la longue traîne » : le cycle de vie des oeuvres change et s’allonge, des créations autrefois arrivées en fin de vie économique peuvent connaître désormais une seconde chance, générant des revenus faibles à l’unité mais importants en cumulé dans le temps. Du côté de la distribution, le choc est au contraire très brutal pour ces industries, confrontées à une diffusion instantanée de grande échelle et à coût marginal proche de zéro des contenus dont elles avaient jusqu’ici la maîtrise. Elles réagissent pour la plupart à ces transformations en essayant de garder le contrôle de l’accès à l’information par le biais de mesures techniques et juridiques (ex : les DRM -Digital rights managments). Après avoir montré comment les États s’en remettent au droit de la concurrence pour tenter de réguler un domaine qui leur échappe, les auteurs concluent en montrant que ces industries ne sont pas au bout de leurs efforts d’adaptation : la profonde mutation à laquelle ils doivent faire face vient de l’utilisateur lui-même. Ne se contentant plus d’une simple position de consommateur, il met à profit les technologies émergentes pour se transformer chaque jour un peu plus en producteur et créateur.

Une conclusion aux résonances certainement familières pour les lecteurs de Transversales ! Reste à savoir si se mouvement d’innovation et de création porté par les utilisateurs/citoyens est spécifique au champs de l’information et de la communication ou bien la marque d’une transformation plus profonde des modes d’organisation de nos sociétés.

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