Nouvelles du climat (09/08)

1er  septembre 2008 | par Jean Zin


-  La fonte de l’Arctique, une bombe climatique à retardement
-  La désagrégation des glaciers du Groenland s’aggrave
-  Refroidissement attendu... dans 500 ans !
-  Bientôt le déluge ?
-  De plus en plus d’ouragans ?
-  Accord pour lutter contre la déforestation
-  La tectonique des plaques a fertilisé les océans et favorisé la production d’oxygène
-  Les oiseaux en retard sur le réchauffement climatique
-  Sauvetage de 1000 manchots au Brésil


Brèves du mois : physique - climat - biologie - santé - technologies

Revue des sciences 09/08




- La fonte de l'Arctique, une bombe climatique à retardement

Contrairement à l'étude qui se voulait rassurante et dont on rendait compte au mois de février, la fonte du permafrost pourrait bien déclencher une bombe climatique décuplant le réchauffement bien au-delà des prévisions actuelles. Il est possible que ce ne soit pas un danger imminent et que cela prenne beaucoup de temps mais tout s'accélère semble-t-il puisque le pôle Nord pourrait être libre de glace avant la fin du mois de septembre, et ce, pour la première fois depuis des dizaines de milliers d'années (et bien que 2008 soit sans doute l'année la plus froide du XXIè siècle) ! Comme je le martèle depuis un moment, c'est cela qui devrait être notre préoccupation principale, éviter ce risque majeur jugé peu probable jusqu'ici mais qui se précise et qui n'a rien à voir avec les débats actuels autour de 2° à 6°C. Il n'est plus temps de se poser la question si c'est un phénomène naturel ou non car ce serait en tout cas terriblement meurtrier. En effet, ce n'est pas seulement du CO2 mais surtout du méthane qui est contenu dans le sol gelé, or le méthane est un gaz à effet de serre 23 fois plus puissant que le CO2. Même s'il se décompose plus rapidement, on aurait le temps de griller la planète en quelques dizaines d'années, au risque de déclencher d'autres phénomènes amplificateurs comme le dégagement du méthane marin. Les risques sont vraiment démesurés. Il faut s'assurer qu'ils ne se produiront pas, puisque c'est ce qu'on croit encore, ou bien empêcher qu'ils ne se produisent s'il s'avère que les nouvelles ne sont pas si rassurantes...

D'importantes quantités de CO2 contenues dans les sols gelés de l'Arctique pourraient être relâchées dans l'atmosphère sous l'effet du réchauffement climatique, ce qui pourrait accélérer ce phénomène, indique une nouvelle étude scientifique.

Les scientifiques savaient que la fonte du permafrost se traduirait par des émissions importantes de gaz à effet de serre mais ils n'avaient pas une idée claire des quantités de carbone piégées dans les sols gelés de l'Arctique.

Pour le déterminer, une équipe de chercheurs américains dirigée par Chien-Lu Ping de l'Université de Fairbanks en Alaska a étudié une large portion de territoire des régions septentrionales d'Amérique du nord, prélevant des échantillons de sol provenant de 117 sites différents, tous situés à au moins un mètre de profondeur.

Jusqu'alors, seules quelques mesures avaient été effectuées et à une profondeur de seulement 40 cm. Rien qu'en Amérique du Nord, les chercheurs se sont ainsi aperçus que les quantités de carbone piégées dans l'Arctique étaient "bien plus importantes que ce que l'on croyait jusqu'alors", jusqu'à 60 fois plus que les estimations précédentes, selon l'étude publiée dans le magazine scientifique britannique Nature Geoscience.

Et les territoires du nord de l'Europe et de la Russie contiennent probablement des quantités équivalentes de carbone piégées par le froid, selon l'étude.

Or le risque de voir le permafrost fondre est bien réel, selon les experts du climat qui estiment que la hausse des températures pourrait aller jusqu'à 6 degrés celsius d'ici la fin du siècle dans l'Arctique, une région particulièrement sensible au changement climatique.

"Le relâchement d'une partie seulement de ce carbone dans l'atmosphère, sous forme de méthane ou de dioxyde de carbone, aurait un impact significatif sur le climat sur terre", souligne dans Nature Geoscience Christian Beer, biochimiste de l'Institut Max Planck de Jena en Allemagne.

Le méthane, autre gaz à effet de serre, est moins abondant que le dioxyde de carbone, mais peut avoir un effet beaucoup plus important sur la hausse des températures.

Les modèles actuels de prévisions climatiques, souligne Christian Beer, ne tiennent pas compte de l'impact potentiel des émissions de gaz retenus dans les sols de l'Arctique.

- La désagrégation des glaciers du Groenland s'aggrave

Un fragment de 29 kilomètres carrés du glacier de Petermann, dans le nord du Groenland, s'est détaché et est parti à la dérive entre les 11 et 24 juillet dernier. Cette glace flottante équivaut en surface à environ une fois et demie celle de la ville de Paris, et constitue la perte la plus importante depuis la désagrégation de 86 km² de banquise entre 2000 et 2001.

Mais ce n'est pas tout. L'équipe de Jason Box, qui travaille quotidiennement sur les données transmises par les images satellites de la Nasa, a observé une énorme faille dans les glaces en bordure du glacier Petermann, et qui pourrait annoncer une cassure beaucoup plus conséquente. Si celle-ci se poursuivait jusqu'au rift situé en amont du glacier, en suivant l'orientation actuelle, elle provoquerait immanquablement une brisure qui isolerait quasi-instantanément plus de 160 km² dans sa partie la plus épaisse, soit un tiers de la masse totale du glacier.

Selon les chercheurs, la région n'a jamais été aussi pauvre en glaces depuis 4 à 6 millénaires, et la tendance se poursuit en s'accélérant.

Au cours de la dernière saison, le bras nord du glacier s'est détaché, larguant un morceau d'environ 10 km² de glaces, alors qu'il avait déjà perdu 94 km² entre 2001 et 2005, cet évènement ayant fait prendre conscience dans le monde de l'ampleur du réchauffement climatique.

- Refroidissement attendu... dans 500 ans !

Une stalagmite trouvée dans la grotte de Buckeye Creek (Etat de Virginie-Occidentale), a donné les renseignements les plus détaillés à ce jour sur les cycles climatiques dans l'est de l'Amérique du nord au cours des sept derniers millénaires. Son étude confirme que pendant les périodes où la Terre a reçu moins de rayonnement solaire, l'océan Atlantique nord a refroidi, entraînant des augmentations de la quantité d'icebergs et des diminutions des précipitations connues sous le nom d'événements de Bond.

Ce Bond-là se prénomme Gérard. Il y a une dizaine d'années, ce géologue et ses collègues avaient découvert que l'Holocène (période commencée il y a dix mille ans et dans laquelle nous nous trouvons toujours) avait été beaucoup moins calme qu'on ne le pensait, avec un cycle de refroidissements tous les 1.500 ans environ pour l'Atlantique nord. Durant les périodes froides, la quantité d'icebergs augmentait et les précipitations diminuaient. Des études complémentaires avaient même montré que des sécheresses prolongées, de quelques dizaines d'années à un siècle, s'étaient même très probablement produites.

Les résultats publiés dans un article de Geophysical Research Letters confirment bien une connexion entre la baisse de l'activité solaire durant l'Holocène et des refroidissements dans l'Atlantique nord, accompagnés de sécheresse pouvant durer un siècle. Si l'on en croit cette étude, un prochain refroidissement devrait se produire d'ici 500 à 1.000 ans mais, selon les chercheurs, le réchauffement climatique causé par l'Homme interférera sûrement avec ce cycle.

- Bientôt le déluge ?

Le dernier réchauffement climatique, à la fin de la dernière glaciation, avait provoqué des pluies diluviennes dont nos mythes ont gardé la trace, il est d'autant plus étonnant que les modèles actuels sous-estiment cette augmentation de l'évaporation et des précipitations. La correction des modèles pour tenir compte de ce phénomène pourrait changer significativement les projections, ce qui va dans le sens des sceptiques sans doute, sauf que cela n'annulera pas le réchauffement mais pourrait faire reverdir le Sahara par exemple ?

Les fortes chutes de pluies deviennent plus fréquentes avec le réchauffement global et surviennent plus souvent que ne l'avaient prédit les modèles climatiques indiquent des chercheurs. Ce résultat implique que l'impact du réchauffement sur le cycle global de l'eau pourrait être plus sévère que tout ce que l'on avait imaginé.

- De plus en plus d'ouragans ?

Il faudra vérifier après-coup ces prévisions tant il est difficile de savoir s'il y aura plus de petits ouragans inoffensifs ou bien au contraire des ouragans plus destructeurs.

C'est au moins dix-sept tempêtes tropicales, dont cinq se transformeront en ouragans violents, qui frapperont les côtes ouest de l'Atlantique Nord durant la saison 2008.

Rien que pour le mois d'aout ces experts annoncent quatre tempêtes, dont trois ouragans, parmi lesquels un ouragan violent.

Les deux facteurs qui ont amené les experts à relever leurs prévisions pour cette saison sont l'élévation des températures de surface des océans (les cyclones se forment dans des eaux chaudes, d'au-moins 26°C) et les basses pressions observées en juin et juillet.

- Accord pour lutter contre la déforestation

Des progrès importants ont été réalisés à Accra sur un certain nombre de sujets clés pour permettre un accord à la Conférence sur le changement climatique à Copenhague en décembre 2009.

Parmi les points positifs figure un accord sur un point : réduire la déforestation dans les pays en développement doit devenir une priorité.

Pour les moyens de réduire les émissions de gaz à effet de serre, les 1.600 participants se sont également mis d'accord sur des approches différenciées selon les secteurs industriels.


- La tectonique des plaques a fertilisé les océans et favorisé la production d'oxygène

C'est un complément à ce qu'on disait dans "La part maudite" sur la production d'oxygène par les premières formes de vie à l'origine de la modification du climat, simplement, il faut ajouter que sans la tectonique des plaques, il y aurait eu beaucoup moins de nutriments, de vie, d'oxygène produit et qu'il faut donc voir dans la tectonique des plaques une origine plus primitive de ce bouleversement climatique. Il n'empêche que c'est la vie qui devra se réguler assez pour préserver ses conditions de possibilité et ne pas trop refroidir l'atmosphère comme il faut qu'on ne la réchauffe pas trop désormais ! Cela veut dire aussi qu'il y a moins de chance qu'il y ait une forme de vie évoluée sur une planète dépourvue de tectonique des plaques.

Des collisions de continents, des chaînes de montagnes brusquement érigées puis rapidement érodées et enfin un boom planctonique : ce scénario complexe, concentré sur quelques millions d'années, expliquerait l'enrichissement de l'atmosphère terrestre en oxygène.

Au début de l'histoire de la Terre et durant deux milliards d'années, l'atmosphère ne contenait pratiquement pas d'oxygène. Puis la quantité de ce gaz corrosif s'est mise à grimper par à-coups jusqu'à la concentration actuelle, de 21% en volume. On considère que cette augmentation s'est réalisée en six étapes. Exprimées en années, leurs datations, de la plus ancienne à la plus récente, sont de 2,65 milliards, 2,45 milliards, 1,8 milliard, 600 millions, 300 millions et enfin 40 millions. Un septième épisode est cependant suspecté à 1,2 milliard d'années avant le présent.

Mais quel rapport avec l'oxygène ? Pour comprendre, il faut prendre un peu de recul, regarder la planète d'assez haut et accélérer le déroulement du temps pour percevoir les mouvements géologiques. A peine surgis, ces massifs montagneux sont attaqués par l'érosion, aérienne et fluviale, qui arrache des milliards de tonnes de poussières riches en minéraux de toutes sortes, et notamment du fer. Charriées par les fleuves ou transportées par les vents, elles finissent toujours par rejoindre l'océan.

Pendant des millions d'années, toutes les mers du globe reçoivent ainsi une pluie continuelle d'engrais, une aubaine pour les organismes planctoniques photosynthétiques. Les algues et les cyanobactéries prolifèrent de plus belle et répandent autour d'elles de l'oxygène, ce gaz qui fut longtemps un poison pour la vie. De plus, l'intense sédimentation enterre au fond des océans des masses de carbone et de pyrite, les empêchant de réagir avec l'oxygène libre, dont la quantité dans l'atmosphère augmentait donc d'autant.


- Les oiseaux en retard sur le réchauffement climatique

Le réchauffement climatique prend les déplacements des populations d'oiseaux de vitesse, ce qui pourrait provoquer des dommages irréversibles à la biodiversité et à l'équilibre biologique.

Au cours des 18 dernières années, les températures moyennes se sont élevées de 0,068°C chaque année, provoquant un glissement de la carte de répartition des températures de 273 kilomètres vers le nord. En général, les espèces tant végétales qu'animales ont suivi ce mouvement, ainsi trouve-t-on fréquemment dans une région déterminée des spécimens habituellement rencontrés dans des habitats situés plus au sud.

Mais cette forme d'adaptation au climat a ses limites. Si l'on considère les aires de distribution des oiseaux en France, on constate que celles-ci n'ont migré vers le nord que de 91 kilomètres en moyenne, restant ainsi à la traîne de 182 kilomètres sur les effets du réchauffement climatique et en se séparant d'autres espèces qui, autrefois, appartenaient au même biotope.

L'équilibre biologique, ainsi que la biodiversité, sont gravement menacés par les effets de cette désynchronisation, qui sépare dramatiquement des espèces dépendantes, notamment sur le plan de la nourriture, mais aussi d'autres fonctions capitales. Ainsi, certaines populations d'insectes pourraient se voir éliminées, ou au contraire proliférer sans contrôle suite à l'apparition ou la raréfaction de certains prédateurs, et avoir des répercutions inattendues sur la croissance et la reproduction des plantes.

- Sauvetage de 1000 manchots au Brésil

Après leur période de reproduction, les manchots migrent vers le Nord entre mars et septembre de chaque année, jusqu'au Sud-Ouest du Brésil. Mais le réchauffement anormal des eaux océaniques (1°C de plus que la moyenne annuelle) aurait trompé leur instinct, les conduisant à poursuivre leur route au-delà des limites habituelles. Ils ont été alors privés de leur nourriture habituelle, et faute d'une alimentation adéquate, se sont échoués sur les côtes brésiliennes en état d'extrême faiblesse.

Actuellement, plusieurs centaines de ces manchots de Magellan sont hébergés dans des centres et nagent afin de se rééduquer et récupérer un maximum de forces. Ils sont alimentés de poissons et reçoivent aussi des compléments vitaminés.



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