Découvertes biologiques (09/08)

1er  septembre 2008 | par Jean Zin


-  Nim Chimpsky, le chimpanzé qui se prenait pour un enfant
-  L’apparition d’un gros cerveau encore inexpliqué
-  La plasticité du cerveau entre toucher et vision
-  La menace d’extinction s’intensifie sur les primates
-  L’homme responsable de la disparition des kangourous géants ?
-  Le plus petit serpent du monde
-  Un virus de virus


Brèves du mois : physique - climat - biologie - santé - technologies

Revue des sciences 09/08



évolution, génétique, biodiversité, éthologie, anthropologie, neurologie



- Nim Chimpsky, le chimpanzé qui se prenait pour un enfant

Avant l'âge de 1 an, le singe connu sous le nom de Nim Chimpsky vivait dans une famille d'Américains moyens, savait réclamer de la nourriture, faire des blagues, la vaisselle et même s'excuser... Il pouvait rester des heures plongé dans des livres d'enfant ou des magazines, buvait du Coca cola, regardait la télé et fumait même un petit joint de temps en temps ! Hélas, il a été abandonné ensuite, sans plus personne à qui parler. Il est mort d'une crise cardiaque le 10 mars 2000 à 26 ans. Histoire très triste et bien troublante à la frontière entre l'animal et l'humain.

- L'apparition d'un gros cerveau encore inexpliqué

Il consiste à s'interroger sur la raison évolutive expliquant l'expansion brutale de la taille du cerveau chez les hominidés, dans le délai relativement court de 5 millions d'années. Pourquoi chez eux et pas chez les grands singes ? Pourquoi au sein d'espèces qui autant que l'on sache, concernant les plus primitives, ne disposaient pas du langage mais avaient commencé à maîtriser la fabrication d'outils ?

Il ne s'agit pas d'une question anodine, notamment pour ceux qui considèrent que l'hominisation a représenté un saut qualitatif brutal dans l'évolution des espèces vivantes.

La question est à la base des débats opposant depuis longtemps les défenseurs de l'évolution génétique et ceux de l'évolution culturelle. Le cerveau s'est-il développé, dès avant l'apparition de l'australopithèque, par une mutation donnant à certaines bases neurales des possibilités associatives n'existant pas jusque là ?

On répond aujourd'hui à ces questions par des hypothèses faisant appel à l'épigénétique. Le génétique n'est pas seul à diriger l'évolution. L'acquisition de capacités telles que l'invention, le langage et le travail en commun a généré un processus d'enrichissement croisé entre le génome, l'environnement et les êtres et outils avec lesquels chaque individu interagit. On en déduit d'ailleurs que ce mécanisme d'enrichissement croisé se poursuit aujourd'hui, avec l'explosion des technologies et des échanges.

A partir de quel moment l'enrichissement croisé entre cerveau génétiquement défini et culture s'est-il produit ? Un colloque qui s'est tenu à Cambridge, UK, en septembre 2007 en a débattu. La plupart des chercheurs participants ont admis qu'aux origines, seuls les facteurs biologiques (notamment génétiques) ont contrôlé le développement du cerveau. Mais vers - 60.000 ans, la biologie et l'organisation du cerveau ont cessé de se modifier et d'autres facteurs ont entraîné le développement de l'hominisation.

Cependant, ces autres facteurs n'auraient pas pu intervenir si les bases neurales adéquates n'avaient pas été déjà en place, longtemps auparavant. Parmi celles-ci, on cite l'expansion progressive de la mémoire de travail, permettant de retenir les souvenirs du passé, reconnaître des objets dans le présent et planifier le futur. Les anthropologues Dwight Read et Sander van der Leeuw ont comparé les mémoires de travail chez le chimpanzé et chez l'homme moderne. Selon les échelles qu'ils ont retenues, la capacité de telles mémoires est de 7 chez le jeune humain de 12 ans, mais ne dépasse pas 2 ou 3 chez le chimpanzé. Ce dernier ne peut donc entrer en compétition avec l'homme. L'ancêtre du chimpanzé ne le pouvait pas davantage face aux hommes d'il y a 60.000 ans, lesquels disposaient de capacités de mémoires analogues aux nôtres.

Une autre évolution neuronale fondamentale aurait été l'apparition des désormais fameux «neurones miroirs» dont nous avons déjà plusieurs fois entretenu nos lecteurs. Ces neurones permettraient d'élaborer une « théorie de l'esprit », concept par lequel on désigne la capacité de réaliser que les autres sont capables de pensées et d'intentions analogues aux siennes. Grâce à ces neurones, les premiers humains ont pu coopérer pour conduire des tâches complexes, même sans disposer de langages organisés autres que des signes et mimiques. Mais la conséquence la plus importante de tels changements neuronaux fut la capacité d'apprendre par imitation et de transmettre l'expérience aux jeunes, ce que les animaux, même les chimpanzés, ne font qu'exceptionnellement, au hasard et, dans les meilleurs cas, sans esprit de suite, si l'on peut dire.

Comme, selon certaines études génétiques, on descendrait d'un petit nombre d'ancêtres communs vers 60 000 ans, on peut être tenté de penser que c'est par un avantage décisif d'ordre cognitif que seuls 2000 hommes environ auraient survécu aux conditions extrêmes de cette époque qui est marquée aussi par les premières tombes, ce qui suggère que cet avantage décisif pourrait bien être cette fois le langage narratif tel que nous le connaissons. Pure spéculation bien sûr, mais le langage est sans doute un facteur sélectif des capacités cognitives plus fort que la maîtrise des techniques, où la mémoire de travail comme les capacités d'imitations sont effectivement déterminantes et ont dû précéder le langage dans le développement du cerveau (l'outil précède le langage).

- La plasticité du cerveau entre toucher et vision

Une plasticité étonnante du cerveau humain vient d'être mise en évidence : les performances du sens du toucher augmentent en quelques jours seulement chez des volontaires aux yeux continuellement masqués. Et cette adaptation est réversible en 24 heures.

Autrement dit, une zone du cerveau impliquée dans la vision semble immédiatement réquisitionnée pour analyser les signaux du toucher. Mais 24 heures après que le masque leur ait été retiré, cette capacité disparaît complètement, le cortex visuel n'étant de nouveau plus stimulé que par la vision.

Selon les auteurs de l'étude, ces résultats remettent en cause l'hypothèse classique selon laquelle des structures indépendantes du cerveau et hautement spécialisées sont engagées dans l'analyse des informations sensorielles d'origine différentes.

- La menace d'extinction s'intensifie sur les primates

On va encore dire qu'on exagère, qu'on cherche à faire peur (à qui ? Pourquoi ?) mais la moitié des espèces de primates sont en voie d'extinction, surtout en Asie.

La principale cause de cette quasi-extinction est, depuis longtemps, la destruction de la forêt tropicale par incendies et défrichements, par ailleurs aussi responsable de 20 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Mais le chercheur dénonce également la chasse, qui atteint aujourd'hui un niveau comparable dans certaines régions y compris là où l'habitat est encore intact. A certains endroits, les primates sont littéralement dévorés jusqu'à l'extinction,

- L'homme responsable de la disparition des kangourous géants ?

Dans un article publié dans les PNAS, les scientifiques affirment que ces marsupiaux auraient vécu jusqu'à 2000 ans après l'arrivée de l'Homme.

Pour eux l'affaire est entendue : en l'absence d'indices indiquant une situation climatique particulière à cette époque, ils estiment que c'est l'Homme qui est responsable de la disparition du kangourou géant. Soit par la chasse, soit par l'utilisation du feu pour défricher des territoires arborés. Un raccourci qui n'est pas du gout de tous. Ainsi le Dr Judith Field, archéologue à l'Université de Sydney, qualifie cette publication de « fantaisiste et spéculative ». Pour elle, les connaissances sur le climat de l'époque ne sont pas assez suffisantes pour pouvoir écarter une extinction naturelle liée à des changements climatiques.

- Le plus petit serpent du monde

- Un virus de virus

La famille des virus s'agrandit... L'équipe de l'Unité de recherche sur les maladies infectieuses et tropicales émergentes, dirigée par Didier Raoult, vient de décrire un nouveau type de virus qui constituerait une nouvelle entité biologique. Ce virus, appelé virophage, infecte les virus géants comme le Mimivirus. Il permet de réaliser des transferts de gènes d'un virus géant à un autre.

Incapable de se multiplier seul dans les cellules, il doit se multiplier dans l'usine à virus de Mimivirus où il est produit parallèlement à son hôte. Parasite, il entraîne une diminution de la multiplication de Mimivirus ainsi que des défauts de fabrication, se caractérisant par des anomalies morphologiques. On retrouve parfois plusieurs particules virales de ce virophage dans une grande capside vide de Mimivirus.

L'analyse du génome du virophage montre qu'il échange des gènes avec Mimivirus mais qu'il a aussi importé des gènes de virus d'autres domaines de la vie. Les chercheurs ont en effet découvert chez Spoutnick une composition génique toute particulière: des gènes de Mimivirus, un gène de virus d'archée et deux gènes proches de ceux des bactériophages.

Le virophage constitue une nouvelle famille virale et une nouvelle entité biologique. C'est un virus de virus qui permet de réaliser le transfert latéral de gènes entre virus géants.



Brèves du mois : physique - climat - biologie - santé - technologies

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