Nouvelles de la vie (01/09)

1er  janvier 2009 | par Jean Zin


-  LUCA, l’ancêtre ARN de la vie ADN reconstitué
-  La chiralité de la vie viendrait de l’espace
-  Mars aurait été favorable à la vie
-  L’origine de la sexualité

-  Comment les plantes acquièrent-elles leur forme ?
-  L’auto-organisation des moules

-  Une trace de libellule de 312 millions d’années
-  Des toiles d’araignée de 140 millions d’années
-  Des dinosaures papa-poules
-  Un nouveau dinosaure carnivore
-  Les éléphants ne supportent pas le zoo

-  La disparition de Néandertal dû à la compétition avec l’homme
-  70% de la population accepterait de torturer autrui...
-  Les hommes sont rouges et les femmes vertes !


Brèves du mois : physique - climat - biologie - santé - technologies

Revue des sciences 01/09



évolution, génétique, biodiversité, éthologie, anthropologie, neurologie



- LUCA, l'ancêtre ARN de la vie ADN reconstitué

En essayant de reconstituer génétiquement LUCA (Last Universal Common Ancestor) l'hypothèse d'un monde ARN avant l'ADN semble confirmé mais, du coup, cela supposerait des températures assez froides alors que les organismes thermophiles ne peuvent se passer de l'ADN moins fragile que l'ARN.

« Notre recherche s'apparente à l'étude étymologique des langues modernes, résume Nicolas Lartillot, nous tentons d'élucider les fondements de leur évolution. Nous avons identifié les caractères génétiques communs entre les animaux, les végétaux, les bactéries, à partir de quoi nous avons construit un arbre de la vie dont les ramifications représentent des espèces distinctes. Elles proviennent toutes d'un tronc commun, Luca en l'occurrence, dont nous nous sommes efforcés d'établir plus à fond la composition génétique. »

« Ce n'est qu'après que les descendants de Luca ont découvert la molécule plus thermostable de l'ADN, qu'ils ont acquise indépendamment (probablement issue d'un virus) et qu'ils l'ont utilisée à la place de l'ancien support plus fragile constitué d'ARN, affirme le professeur Lartillot. Cette transformation leur a permis de s'éloigner de leur petit microclimat froid, d'évoluer et de se diversifier en une variété d'organismes sophistiqués capables de tolérer la chaleur ».

- La chiralité de la vie viendrait de l'espace

Cette théorie d'une modification de l'orientation droite ou gauche des molécules sous l'effet des rayonnements cosmiques n'explique pas pourquoi le vie est constituée de sucres dextrogyres alors que les acides aminés sont lévogyres, ce qui pourrait cette fois être relié à la "brisure de symétrie" des forces électro-faibles ! On comprend bien que les protéines dont la forme détermine la fonction ne peuvent mélanger des formes différentes de molécules. Simplement le côté choisi ne serait pas purement aléatoire mais amplifiant, comme dans la plupart des instabilités, une dissymétrie initiale, différente pour les acides aminé ou les sucres ?

En utilisant les faisceaux de rayons X de l'Advanced Photon Source (APS), il a bombardé un matériau magnétique sur lequel était adsorbé un mélange deux types de molécules de butanol (CH3-CHOH-C2H5). Sous l'action de ce rayonnement ionisant, des électrons sont produits dont le spin est polarisé dans une certaine direction. Ces particules se révèlent capables de modifier des liaisons à l'intérieur des molécules de butanol et d'en changer la chiralité. En modifiant la direction de l'aimantation du permalloy (Fe0.2Ni0.8), grâce à un champ magnétique, on peut produire un excès notable de molécules d'une chiralité donnée.

Or, on sait que les champs magnétiques, le fer et des rayonnements ionisants sont très répandus dans l'univers. Il n'est pas difficile d'imaginer que des molécules organiques issues de la chimie complexe du milieu interstellaire et dont on détecte la présence dans le cosmos aient pu être influencées par le mécanisme découvert par les chercheurs. Ce pourrait être le cas lorsque ces molécules sont piégées dans la glace recouvrant une poussière interstellaire riche en fer, à la surface d'une météorite, dans une comète où à la surface d'une planète par exemple.

- Mars aurait été favorable à la vie

La planète Mars a un jour abrité de l'eau liquide dépourvue d'acidité. C'est ce que suggère fortement la découverte de gisements de carbonates, une roche introuvable en milieu acide. Il a donc dû exister des conditions propices à l'apparition de la vie.

- L'origine des spermatozoïdes

Les premiers spermatozoïdes seraient une stratégie pour échapper aux virus ! On comprend que ce soit un bon support pour transmettre un ADN non piraté par un virus.

Emiliania huxleyi est une algue unicellulaire microscopique exclusivement marine appartenant aux coccolithophoridés et au groupe des haptophytes. Elle protège son unique cellule sous une couche de plaques de calcite généralement discoïdes appelées coccolithes. Se déposant au fond des océans depuis des temps immémoriaux, les sédiments formés par ces amas de calcite deviennent de la craie.

Lorsque E. huxleyi est attaquée par un virus, elle se transforme complètement et devient invisible pour son ennemi. Constituée d'une cellule de type diploïde, ce qui signifie que ses chromosomes sont constitués par paires, à l'instar de nos propres cellules, l'algue passe soudain à un stade haploïde, chaque chromosome n'étant plus présent qu'en un seul exemplaire.

Un jour, un de nos étudiants en thèse, Miguel Frada, a noté la présence de cellules nageant un peu comme les spermatozoïdes dans le milieu de culture.

A l'examen, les scientifiques se sont aperçus que ces nouvelles cellules étaient formées exactement de la même série de gènes que E. huxleyi, mais en un seul exemplaire. A peine revenus de leur étonnement, ils ont aussi constaté la présence dans le milieu de culture du virus EhVs (Emiliania huxleyi Viruses) spécifique de E. huxleyi. Ce virus est très commun, et réputé pour décimer de très importantes quantités de ces algues, dont les fortes concentrations sont quelquefois visibles depuis l'espace. « Alors totalement invisibles pour le virus, car elles présentent une surface impénétrable, ces cellules permettraient à l'espèce de vivre en paix en attendant la dilution des virus par les courants océaniques »

- Comment les plantes acquièrent-elles leur forme ?

Les gènes ne font qu'orienter des forces physiques et des processus d'auto-organisation, intervenant aux points de bifurcation.

D'un point de vue plus général, ces travaux s'inscrivent dans un changement de paradigme en cours dans la biologie du développement: les chercheurs ne considèrent plus le développement embryonnaire comme un processus sous le contrôle strict de la génétique, mais plutôt comme un processus à plusieurs niveaux qui interagissent entre eux. Ainsi, l'équipe a démontré que la morphogénèse du méristème est un phénomène émergent issu du comportement individuel des cellules cherchant à résister au stress mécanique. Cependant, ce mécanisme n'est pas le seul à l'oeuvre lors de la morphogénèse des plantes. Il fonctionne en parallèle aux chaînes de réactions induites par l'auxine, une hormone fondamentale dans la formation des organes des plantes. Comprendre comment ces deux mécanismes se coordonnent pour former des structures et des tissus parfaitement différenciés est un champ de recherches désormais ouvert aux chercheurs.

- L'auto-organisation des moules

Ce qu'on appelle auto-organisation ici, c'est une organisation qui émerge à partir de règles simples appliquées par chaque individu en rapport avec ses congénères, générant sans le savoir des formes optimisées, sélectionnées par l'évolution et donc pas du tout immédiates comme dans un marché. On y verrait plutôt une sélection de groupe qu'une auto-organisation puisqu'elle est contrainte génétiquement comme d'un super-organisme, tout le contraire d'un arrangement idéal ou d'une complexification qui se ferait toute seule comme par magie (la fameuse "main invisible") alors qu'il y a eu élimination violente de toutes les autres solutions au long de l'évolution.

Lorsqu'elles sont en groupe sur le sable, les moules ne s'installent pas n'importe comment: elles dessinent des figures labyrinthiques très structurées qui, à grande échelle, forment de larges bandes. Comment les coquillages parviennent-ils à créer ces motifs et, surtout, pourquoi ? Les scientifiques du Centre de recherches sur la cognition animale, à Toulouse, en collaboration avec leurs collègues hollandais et britanniques, ont mené l'enquête: les structures sont issues d'une véritable "auto-organisation" des individus, et leur donnent un avantage écologique en améliorant leur survie.

"Ils ne peuvent être que la conséquence d'interactions entre les individus, puisque dans notre expérience, il n'y avait aucun élément perturbateur, comme une hétérogénéité du substrat ou des algues en suspension, par exemple", explique Guy Theraulaz. L'analyse du comportement des mollusques et la construction d'un modèle numérique ont permis ensuite de préciser les conditions nécessaires à l'apparition des motifs. Trop peu nombreux, les coquillages forment des grappes isolées. Lorsque la densité augmente, les figures labyrinthiques apparaissent. Jusqu'à un certain point, au-delà duquel les moules préfèrent s'installer ailleurs. La taille des grappes et la forme des structures seraient donc optimisées. Mais pourquoi ?

Le taux de survie apporte la réponse: plus les moules sont organisées, plus elles vivent longtemps. Non seulement les individus grandissent plus vite, probablement à cause d'une moindre compétition entre eux, mais les communautés résistent aussi mieux au ressac.


- Une trace de libellule de 312 millions d'années

Des chercheurs de l'Université Tufts ont découvert ce qu'ils croient être le plus ancien fossile d'un insecte volant dans un affleurement rocheux près de North Attleboro, dans le Massachusetts.

L'empreinte, d'environ sept centimètres de long retrouvée sur un éperon rocheux à proximité d'un centre commercial, représente le thorax, l'abdomen ainsi que six pattes d'un insecte dont l'aspect extérieur rappelle une libellule. Selon son découvreur, géologue à l'Université de Tufts, il serait en réalité un très lointain cousin des éphémères.

Le fossile a été retrouvé dans une couche de boue solidifiée d'aspect rouge bordeaux, vieille de 312 millions d'années. Il constitue la plus ancienne trace de passage d'un insecte vivant enregistrée dans la roche, elle est sans doute due au bref atterrissage de l'animal sur une nappe de boue.

C'est le Carbonifère, période des grands arbres où l'oxygène augmente ce qui favorise le gigantisme des insectes entre autres.

- Des toiles d'araignée de 140 millions d'années

L'époque se situe au Crétacé, alors que la Terre était peuplée de dinosaures. Quelques-uns s'étaient déjà envolés en devenant oiseaux, mais les plantes à fleurs restaient rares, et ne se répandront en abondance que quarante millions d'années plus tard en entraînant dans leur prolifération celle des insectes. Pourtant, le piège de soie était déjà prêt...

Pourtant les araignées sont bien plus vieilles. Cousines des scorpions, elles sont comme eux des arachnides, un groupe d'arthropodes qui a arpenté les terres du globe il y a très longtemps. Le plus ancien scorpion connu devait être la terreur des terres émergées au Silurien inférieur il y a 435 millions d'années et seulement quelques millions d'années plus tard des araignées couraient sur leurs huit pattes.

« Ce que nous avons découvert ne peut être qu'une toile d'araignée circulaire fossilisée, rapporte Martin Brasier. Nous avons aussi trouvé des enchevêtrements de soie préservés dans l'ambre. C'est vraiment surprenant de trouver quelque chose d'aussi fragile conservé depuis tant de millions d'années ».

- Des dinosaures papa-poules

Le paléontologue David Varricchio (Montana State University, USA) et ses collègues se sont intéressés à trois types de théropodes, des bipèdes rapides avec de petites pattes avant, dont la lignée a évolué jusqu'à donner les oiseaux modernes. Pour le Troodon, le Citipati et l'Oviraptor, des nids fossilisés ont été retrouvés avec les restes d'un adulte veillant sur le nid. S'agissait-il d'un mâle ou d'une femelle?

Pour se faire une idée, le biologiste Gregory Erikson (Florida State University) a étudié de près les os de ces dinosaures couvant les œufs. Il n'a pas trouvé les caractéristiques propres aux os des femelles que l'on observe aujourd'hui chez les plus proches parents vivants des théropodes, les oiseaux et les crocodiles. Il pense donc que ce sont les papas qui couvaient les œufs.

Chez les oiseaux, les études montrent que les mâles participent aux travaux du nid dans 90% des cas. Chez les espèces où les couvées sont très importantes, on retrouve plus souvent le mâle couvant les œufs que chez les espèces avec de petites couvées, précisent les chercheurs. Un comportement qui aurait déjà prévalu chez les théropodes.

- Un nouveau dinosaure carnivore

Le squelette d'un dinosaure carnivore n'appartenant à aucune espèce connue a été exhumé de la roche en Patagonie.

Le nouveau venu, si on peut parler ainsi d'un animal ayant vécu il y a 70 millions d'années, est apparenté au groupe des dromaeosauridés (dinosaures carnivores) et présente plusieurs caractéristiques inédites.

Avec une longueur totale de 5 à 6,50 mètres (selon la longueur de la queue, actuellement incomplète) et un poids de 360 à 400 kg, Austroraptor cabazai ferait pâle figure auprès des 40 mètres du Supersaurus ou des 100 tonnes de l'Argentinosaurus... Mais il intimiderait n'importe quel membre de son groupe, tous beaucoup plus petits que lui, et dont les descendants ont pris leur envol quelques dizaines de millions d'années plus tard pour devenir les oiseaux. Ce nouveau prédateur appartient à un groupe sud-américain connu sous l'appellation de unenlagiines (ce qui signifie demi-oiseau dans un mélange de latin et de chilien), d'où sont issus les archéoptéryx. Contrairement à leurs cousins de l'hémisphère nord, comme le Velociraptor rendu célèbre par Jurassic Park, les unenlagiines avaient une tête beaucoup plus longue, plus effilée, et de petites dents coniques. Ils vivaient dans un environnement parsemé de nombreuses rivières peuplées de poissons et de tortues, dont les restes fossilisés foisonnent.

- Les éléphants ne supportent pas le zoo

Pas plus que nous, la prison et l'isolement...

L'espérance de vie des femelles Elephas maximus est de 19 ans dans les zoos et de 41,7 ans pour les éléphants birmans transporteurs de grumes. Surtout, la mortalité des jeunes est plus élevée dans les zoos, selon les chercheurs, et elle est aggravée par les transferts d'animaux qui séparent les petits de leurs mères.

Voir aussi Futura-Sciences.

- La disparition de Néandertal dû à la compétition avec l'homme

Selon l'algorithme, les hommes modernes ont occupé des territoires allant jusqu'à une frontière méridionale marquée par la vallée de l'Ebre pendant la phase froide (H4) puis ont investi le sud de la péninsule ibérique au cours de la phase tempérée suivante (GI8). L'étude conclut que les néanderthaliens du sud de la péninsule ibérique auraient été les derniers à disparaître car ils auraient été préservés de la compétition directe avec les hommes modernes par la phase froide, au cours de laquelle les deux populations auraient exploité des territoires distincts. Pour les auteurs, la disparition de Néanderthal serait donc due à la compétition avec Sapiens sapiens.

C'est donc la confirmation de l'hypothèse très controversée de mon récent compte-rendu sur l'émergence de l'humanité. Voir aussi Futura-Sciences.


- 70% de la population accepterait de torturer autrui...

Rien de nouveau mais il est bon de le rappeler dans les circonstances présentes. Bien sûr, un facteur essentiel de la cruauté, c'est la confiance dans l'expérimentateur, ce n'est pas de la pure méchanceté mais plutôt de la crédulité mais c'est la même crédulité qui fait massacrer quelque bouc émissaire désigné à la vindicte publique.

L'expérience de Milgram l'avait démontré il y a cinquante ans, sa réédition vient de le confirmer.

« Lorsqu'ils sont sous pression, les hommes peuvent faire des choses effrayantes », conclut Jerry Burger dans PsychoMedia, en précisant que « ce phénomène peut partiellement expliquer qu'en temps de conflit, les gens puissent prendre part à des génocides ».

- Les hommes sont rouges et les femmes vertes !

C'est l'amusante constatation qui pourrait être utilisée dans la reconnaissance faciale, les hommes sont plus rougeauds et les femmes plus pâles ! A noter, mais on s'en doutait, que nos mimiques sont héréditaires et non pas apprises par imitation, ce qu'on constate avec les aveugles notamment.




Brèves du mois : physique - climat - biologie - santé - technologies

Revue des sciences 01/09


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