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Question à... Yves Cochet

Le 31  octobre 2005 par Yves Cochet

Vous prophétisez une fin du pétrole apocalyptique, vous y croyez vraiment ou c’est juste pour frapper les esprits ?

Je ne suis pas prophète, je m’exerce à la prospective politique. Je n’annonce pas "la fin du pétrole", mais "la fin du pétrole bon marché". Le mot "apocalypse" doit être compris en son sens étymologique d’"avertissement". Mais, oui, je veux frapper les esprits, en analysant le plus justement (justesse + justice) le mouvement matériel du monde. A cette fin, le plus important est, pour chacun d’entre nous, de déconstruire nos représentations issues du passé afin d’être ouvert aux signaux du futur, de rechercher une vision partagée de l’avenir. Sans changement de nos représentations, pas de changement de la réalité elle-même.

Ne peut-on considérer que la fin du pétrole soit plutôt une chance face au réchauffement climatique ?

Derechef, il n’est pas question de "fin du pétrole", mais de l’entrée du monde dans l’ère de l’énergie chère, pour toujours. Il est politiquement imprudent de croire que les groupes humains qui ont poussé et poussent à la consommation de pétrole s’arrêteront de le faire. Nous pouvons seulement ralentir, réduire, faire décroître la consommation de pétrole afin d’atténuer la vitesse du changement climatique (aval du carbone) et d’essayer de conserver les valeurs cardinales de la paix, de la démocratie et de la solidarité en repoussant, lissant, rabotant le choc du Peak Oil (amont du carbone).

D’après vous, que pourrions nous faire ?

Une seule orientation : la sobriété. Exemples de premier niveau : dans le secteur de la mobilité (transports), remplacer la philosophie actuelle des pays riches "plus loin, plus vite, plus souvent, et moins cher" par "moins loin, moins vite, moins souvent, et (de toute façon) plus cher" ; dans le secteur agroalimentaire, remplacer la philosophie actuelle des pays riches "alimentation toutes saisons, tous continents, toutes viandes" par "alimentation plus saisonnière, plus local, plus végétale". La sobriété peut se décliner en centaines de mesures de second niveau, dans tous les domaines, à tous les échelons (voir mon livre).