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Physique (11/08)

Le 1er  novembre 2008 par Jean Zin


-  Un cristal d’électrons
-  Courber la lumière sans miroirs
-  Premier réseau de cryptographie quantique
-  Amélioration de la vitesse en cryptographie quantique
-  Prix Nobel pour brisures de symétrie
-  Des astronomes émettent des doutes sur la matière noire
-  Ecouter la matière noire
-  Ecouter les cordes cosmiques
-  Les galaxies elliptiques, nées de collisions géantes
-  L’explosion d’une supernova à l’origine du système solaire
-  Le soleil vient d’ailleurs...
-  Pas de glace sur la Lune ?
-  Coucher de soleil sur Osiris


Brèves du mois : physique - climat - biologie - santé - technologies

Revue des sciences 11/08



cosmologie, astronomie, physique quantique



- Un cristal d'électrons

Des chercheurs de l'Université McGill de Montréal ont découvert un nouvel état de la matière, un cristal d'électron quasi-tridimensionnel, dans un matériau très similaire à ceux utilisé dans la fabrication de transistors modernes. Cette découverte pourrait aider le développement de nouveaux dispositifs électroniques.

En travaillant avec un des matériaux semi-conducteurs les plus purs jamais fait, ils ont découvert le cristal d'électron quasi-tridimensionnel dans un dispositif refroidit à des températures ultra basses, 100 fois plus froide que celle de l'espace intergalactique. Le matériau a ensuite été exposé au champ magnétique continu le plus puissant qu'on puisse générer sur terre.


- Courber la lumière sans miroirs

Les chercheurs de l'Institut d'électronique fondamentalede Paris1, en collaboration avec le Groupe d'étude des semi-conducteurs à Montpellier2, ont mis au point un nouveau type de cristaux photoniques, dits "à gradient", formés par une succession de grilles métalliques. Ils viennent donc de démontrer leur capacité à courber la lumière.

Les tiges verticales forment une maille à motif carré à l'entrée du cristal, progressivement déformé en rectangle jusqu'à l'autre bout. Lorsque la lumière pénètre dans le cristal, elle se courbe grâce aux interactions électromagnétiques avec les tiges, comme pour éviter les obstacles sur son chemin.

- Premier réseau de cryptographie quantique

Le premier réseau de communication utilisant la cryptographie quantique a été testé avec succès à Vienne.

Ce réseau emprunte plus de 200 km de fibres optiques standards déjà installées dans la ville. Il est constitué de six nœuds reliés entre eux par huit liens longs de 6 à 80 kilomètres.

La technologie est donc au point mais souffre encore de quelques défauts. Les clés ne peuvent voyager dans les fibres sur plus de 100 kilomètres. Les débits sont encore lents, identiques à ceux d'un modem des années 80 (quelques milliers de bits), ce qui interdit de la transmission vidéo cryptée en direct. Enfin, si la mécanique quantique garantit la sécurité des liens, elle n'est pas encore capable d'assurer celle des nœuds, là où se font le stockage des clés et les calculs de décodage/encodage. Et là où les pirates attaquent...

Voir aussi Futura-Sciences.

- Amélioration de la vitesse en cryptographie quantique

L'équipe a démontré que des clefs quantiques pouvaient être envoyées le long d'une fibre optique de 20 kilomètres avec un débit supérieur à 1 Mbit/s.

La cryptographie quantique n'était jusqu'ici possible à travers les réseaux en raison de la nécessité de partager la bande passante des clés entre de nombreux utilisateurs différents; celle-ci restait tout simplement trop faible, typiquement moins de 10 kbit/s pour 20 kilomètres de fibre. Shields et ses collègues ont réussi à l'amplifier jusqu'à 1,02 Mbit/s en améliorant les dispositifs à semi-conducteurs utilisés pour détecter les photons uniques qui composent des clefs quantiques. (Il est ici essentiel d'employer des photons uniques sans quoi une oreille indiscrète pourrait "écouter" les photons excédentaires sans indiquer sa présence).

"La 'distribution de clés quantiques' a certainement devant elle un futur radieux", ajoute Shields. "Je pense qu'elle devrait être commercialisable dans les trois à cinq années à venir, et qu'elle pourrait devenir une norme pour la sécurité de l'information dans tous les réseaux de transmission."

- Prix Nobel pour brisures de symétrie

Le prix Nobel de physique 2008 récompense des travaux visionnaires dans le domaine de la physique des particules faisant intervenir la notion capitale de symétrie brisée. Les trois lauréats sont tous d'origine japonaise même si l'un d'entre eux, Yoichiro Nambu, a été naturalisé Américain. Le deux autres récipiendaires, Makoto Kobayashi et Toshihide Maskawa se sont illustrés, tout comme Nambu, par leurs travaux sur la théorie des interactions nucléaires.

Nambu fut le premier à proposer que les interactions nucléaires fortes devaient être décrites par une théorie des champs de type Yang-Mills avec le groupe de Lie SU(3). C'est exactement ce que Gell-Mann et d'autres reprendront des années plus tard dans le cadre de la chromodynamique quantique. Yoichiro Nambu est donc le père de la notion de couleur pour les quarks.

La théorie de la brisure de symétrie dans le domaine des particules élémentaires de Nambu n'était cependant pas conforme aux règles de la relativité restreinte et c'est justement pour remédier à ce défaut que Peter Higgs, François Englert et Robert Brout introduiront simultanément et quelques années plus tard le fameux mécanisme de Higgs-Englert-Brout, que l'on suppose être à l'origine des masses du modèle standard.

C'est lui qui démontra le premier, bien que simultanément avec Léonard Susskind, que la fameuse amplitude de Veneziano pour le modèle dual des hadrons pouvait être interprétée comme une excitation d'une corde.

Les 2 autres s'intéressèrent à la découverte d'une autre symétrie brisée en physique, la violation CP.

Ils découvrirent que cela n'était possible que s'il existait non pas trois types de quarks comme on le pensait à l'époque mais six, rangés en trois familles.

- Des astronomes émettent des doutes sur la matière noire

Jusqu'à présent les observations favorisent toutes le modèle de la matière noire froide, dit encore le Cold Dark Matter model ou CDM (une petite composante de matière chaude n'est pas exclue cependant). Le problème est que dans ce scénario de croissance hiérarchique, les galaxies évoluant au cours de l'histoire de l'Univers par collisions et fusions en série, une très grande variété devrait en résulter sans aucune corrélation entre les caractéristiques des galaxies comme leur taille, leur luminosité, leur couleur et leur masse.

Or, un groupe d'astronomes avec à leur tête Mike Disney de l'Université de Cardiff, l'un des découvreurs de la contrepartie optique du pulsar du Crabe en 1969, vient de publier le résultat de statistiques portant sur les caractéristiques de près de 200 galaxies découvertes initialement dans le domaine radio, à l'aide du radiotélescope de Parkes, et examinées ensuite dans le domaine optique avec le Sloan Digital Sky Survey (SDSS).

A première vue, ce qu'ils ont découvert est en contradiction avec le modèle CDM car des corrélations importantes ont été découvertes entre 6 paramètres décrivant des galaxies aussi diverses que les elliptiques, les spirales etc. Parmi ces 6 paramètres, on trouve la masse d'hydrogène neutre, la masse totale qui tient compte d'une hypothétique composante sous forme de matière noire, la luminosité, etc. Selon les chercheurs, il suffirait d'un seul paramètre pour fixer tous les autres même s'ils ignorent encore sa nature. Comme dans le cas des étoiles avec leurs rayons et leur température, il s'agit probablement de la masse de la galaxie.

Normalement, on l'a dit, la croissance chaotique des galaxies dans le modèle CDM ne devrait pas permettre ce genre de corrélations mais les tenants du modèle de la matière noire froide affirment qu'il est encore trop tôt pour en arriver à des conclusions aussi extrêmes. En effet, les preuves indirectes de l'existence de la matière noire obtenues dans le cas des collisions d'amas de galaxies ne se balaient pas d'un revers de la main.

- Ecouter la matière noire

Pour détecter les mystérieuses particules de matière noire, une équipe de chercheurs canadiens explore une piste prometteuse et originale : à l'aide d'une chambre à bulles, il serait possible... de les entendre.

Il s'agirait de particules neutres n'interagissant que très faiblement avec la matière normale et probablement uniquement par l'attraction gravitationnelle.

Lorsqu'une particule de matière noire pénètre à l'intérieur d'une de ces gouttes et entre en collision avec un noyau, l'énergie qu'elle dépose va se répartir dans la goutte et, plus précisément, provoquer la transition de phase du liquide en vapeur. Le phénomène s'accompagnera d'une émission sonore.

- Ecouter les cordes cosmiques

Jamais entendu parler de ces cordes cosmiques associées à la brisure de symétrie du Higgs avant...

Mesurant jusqu'à plusieurs milliards d'années-lumière, les cordes cosmiques (à ne pas confondre avec les supercordes cosmiques) sont des objets pour l'instant théoriques. Leur existence est déduite du mécanisme de brisure de symétrie associé au boson de Higgs dans le cadre des théories de Grande Unification. Selon un chercheur américain, elles pourraient signaler leur présence dans l'Univers par de brusques bouffées d'ondes radio. Certaines ont peut-être déjà été observées...

Comme Kibble l'a montré, le refroidissement ultra-rapide de l'Univers causé par son expansion devait s'accompagner de sortes de condensations d'énergie sous forme de longs filaments plus fins qu'un proton et pouvant s'étendre, des centaines de millions d'années plus tard, sur des distances proprement cosmologiques, se comptant en milliards d'années-lumière.

Ces cordes cosmiques, comme on appelle ces filaments, pouvaient servir de germes de surdensités pour amorcer la formation des amas de galaxies.

Les cordes cosmiques sont dynamiques et, tout comme leur cousines les supercordes cosmiques dont nous ne dirons rien ici, elles peuvent claquer en émettant des ondes gravitationnelles. Mais il s'agit d'une signature là aussi difficilement observable. En revanche, elles sont, elles, supraconductrices. Elles pourraient donc générer d'intenses bouffées d'ondes électromagnétiques.

Tanmay Vachaspati de la Case Western Reserve University à Cleveland, Ohio, vient de publier un article dans lequel il suggère que les émissions électromagnétiques des cordes cosmiques ne sont pas seulement décelables par des bouffées de rayons gamma mais aussi grâce à des ondes radio, susceptibles d'être émises.

Remarquablement, Duncan Lorimer et ses collègues ont observé l'année dernière une brusque bouffée dans le domaine radio qui devait être générée à une distance cosmologique et à laquelle aucune galaxie ne pouvait être associée. Elle a duré environ une milliseconde et le pulse d'ondes radio était centré sur la fréquence de 1,4 GHz. Ce genre d'observation et son occurrence dans le temps sont justement conformes aux calculs de Vachaspati et le chercheur s'interroge donc.

- Les galaxies elliptiques, nées de collisions géantes

Les galaxies elliptiques seraient le résultat de la collision puis de la fusion de deux galaxies spirales. C'est ce que tend à confirmer une étude conduite par simulation informatique par une équipe d'astrophysiciens français.

- L'explosion d'une supernova à l'origine du système solaire

Comment la nébuleuse protosolaire a-t-elle formé notre système planétaire ? Par effondrement, certes, mais pourquoi celui-ci s'est-il produit ? Depuis longtemps, les astrophysiciens pensent qu'un coup de pouce, ou plutôt une onde de choc, l'a déclenché. L'hypothèse d'une supernova était soutenue par la cosmochimie des météorites, mais pas du tout par des simulations numériques... jusqu'à aujourd'hui !

En effet, la nébuleuse à l'origine du Soleil et de son cortège de planètes était trop peu massive et surtout trop peu dense, si on la compare aux observations dans la Galaxie, pour s'effondrer d'elle-même. L'hypothèse d'une onde de choc augmentant sa densité était donc évoquée et l'explosion d'une supernova au voisinage de la nébuleuse semblait une excellente explication.

Dans tous les modèles examinés sur ordinateur par les chercheurs, l'onde de choc heurte un nuage de la masse du Soleil, composé de poussières, d'eau, de monoxyde de carbone et d'hydrogène moléculaire. Les températures peuvent atteindre 1.000 K et grâce à l'introduction d'un nouveau mécanisme de refroidissement, le nuage peut s'effondrer. Environ 100.000 années plus tard la nébuleuse protosolaire est devenue 1.000 fois plus dense qu'auparavant, et après 160.000 ans, un protosoleil est là, au cœur d'un nuage devenu un million de fois plus dense.

- Le soleil vient d'ailleurs...

Des simulations sur la formation et l'évolution du disque galactique montrent désormais que, dans les galaxies du type de la Voie Lactée, les étoiles telles que le soleil peuvent migrer sur de grandes distances. Se trouverait dès lors modifiée l'idée selon laquelle il existe des parties de galaxies, appelées zones habitables, plus favorables à la vie que d'autres.

Les recherches indiquent par conséquent que lorsqu'il s'est formé il y a 4,59 milliards d'années, soit environ 50 millions d'années avant la Terre, il a pu être soit plus proche, soit plus éloigné du centre de la galaxie, au lieu de se situer à mi-chemin en direction du bord extérieur, comme actuellement.

Les étoiles migrantes aident par ailleurs à comprendre un vieux problème qui concerne le mélange chimique des étoiles dans l'environnement de notre système solaire, connu depuis longtemps pour être l'endroit d'un plus grand mélange que ce qu'offriraient des étoiles demeurant là où elles sont nées. En réunissant des étoiles en provenance de différents lieux, l'environnement du soleil est devenu un lieu plus divers et intéressant

- Pas de glace sur la Lune ?

Les nouvelles images ont été prises au milieu de l'été lunaire, lorsque que suffisamment de lumière solaire diffuse de la paroi interne au sommet du cratère pour l'éclairer faiblement. Les températures au fond du cratère devraient être inférieures à 90 kelvins, assez froides pour qu'il y ait de la glace. Les images ne montrent pourtant aucun éclat particulier qui trahirait la présence de glace pure. Il n'y a donc peut-être pas de glace du tout

Voir aussi Futura-Sciences.

- Coucher de soleil sur Osiris

Une équipe INSU-CNRS de l'Institut d'astrophysique de Paris (CNRS, Université Pierre et Marie Curie) a obtenu le premier spectre optique complet d'une exoplanète, HD209458b. Cette géante gazeuse étant très proche de son étoile, elle subit une évaporation et il a été proposé de la surnommer "Osiris". Réalisé à partir des données du télescope spatial Hubble, il couvre tout le domaine optique de l'ultraviolet jusqu'à l'infrarouge. En analysant la lumière de l'étoile vue à travers l'atmosphère de sa planète, les astronomes ont ainsi pu déterminer la structure de cette atmosphère. Ils ont noté la présence d'hydrogène et de sodium et éventuellement des oxydes de vanadium et de titane. Le sodium se répartit en plusieurs couches comme les nuages sur Terre, tout étant plus abondant à basse qu'à haute altitude. Par diffusion, le ciel est pourpre et l'étoile au coucher par absorption est cyan.




Brèves du mois : physique - climat - biologie - santé - technologies

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