La décision des lords britanniques de refuser l'immunité au dictateur sanglant que fut Pinochet constitue l'une de ces "ruses de l'histoire" dont raffolait Hegel. Même l'esprit le plus subversif et le plus imaginatif aurait eu du mal à concevoir un tel scénario. "La réalité a plus d'imagination que nous" disait François Truffaut à travers l'un des personnages de son film La femme d'à côté. Certes une telle hirondelle est bien loin de faire le printemps démocratique à l'échelle planétaire. La quantité de tyrans sanguinaires en circulation dans le monde (voir le récent sommet de Paris des chefs d'Etats africains) montre que nous sommes encore loin de cette "société de droit mondiale" qui constitue l'un des volets majeurs de la citoyenneté terrienne à construire. Mais il est des victoires symboliques, aussi partielles soient-elles, qui ouvrent des brèches considérables dans la voie d'une "mondialisation à visage humain". Il a fallu des siècles pour passer de la "guerre de tous contre tous" à la construction d'espaces politiques pacifiés et civilisés dans le cadre des Cités puis des Etats-nations. Il serait hautement souhaitable pour l'humanité, que la constitution juridique, politique et sociale de l'espace planétaire, aujourd'hui réduit pour l'essentiel à sa face financière, se réalise beaucoup plus rapidement. Ce peut être la grande aventure du XXIème siècle.
L'enjeu est d'autant plus important que l'humanité est confrontée à deux autres rendez-vous essentiels dont il n'est pas exagéré de dire qu'ils conditionnent son existence :
- l'un est écologique et il porte sur ces deux biens communs vitaux que sont l'air et l'eau. Le non-accès pour deux milliards d'êtres humains à l'eau potable, et les risques croissants liés à l'effet de serre et aux pollutions multiples qui empoisonnent l'air que nous respirons, en sont les aspects les plus spectaculaires ;