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3 questions à... Stéphane Hessel

Le 30  septembre 2003 par Stéphane Hessel

L’ONU, une organisation à réformer ?

Je ne poserai pas le débat en ces termes. A mon sens il ne s’agit pas de réformer l’ONU qui est et reste l’organisation intergouvernementale dont nous avons besoin. Il s’agit de réaffirmer le primat de cette institution pour les Etats membres et que ceux-ci doivent mettre en mesure de remplir toutes les missions que sa charte lui confie. Si l’ONU paraît insuffisamment efficace, c’est que ses Etats membres et notamment les plus puissants d’entre eux n’ont trop souvent pas pris au sérieux les engagements qu’ils ont pris dans ce cadre. La Charte n’a pas vieilli, même si la situation du monde, les défis nouveaux, l’accession de cent nouveaux Etats souverains exigent une adaptation de son fonctionnement pratique.

Que faire alors pour redonner à l’ONU sa légitimité ?

Il convient de conférer une nouvelle interprétation aux principes fondateurs de la Charte. Le Conseil de Sécurité (chapitres VI et VII de la Charte) doit être constitué selon ses missions qui sont essentiellement axées sur le maintien de la paix et le règlement des conflits. Pour remplir ces missions, cet organe a besoin de la coopération énergique des nations qui assument dans le monde actuel les principales responsabilités, au plan mondial et au plan régional. Ce ne sont plus les mêmes qu’en 1945. Il faut donc revoir sa composition et inclure d’autres Etats parmi ses membres permanents afin d’accroître son efficacité. Le Conseil Economique et Social (chapitres X et XI de la Charte) à qui la Charte donne des compétences très larges n’a pas tenu ses promesses. Son rôle doit être réaffirmé et sa composition révisée. Afin de lui donner tout son poids face au déséquilibre scandaleux de l’économie mondiale, ce sont les chefs de gouvernement qui devraient y siéger, comme actuellement au G8. Troisième aggiornamento : le déficit de la prise en charge des enjeux de l’environnement et ceux de l’information et de la communication doit pouvoir être pris en compte par des organes appropriés de l’ONU .

A l’image de l’Europe, un accès direct des citoyens à une forme internationale de représentation reconnue par les Etats doit-il être envisagé ?

C’est l’interprétation moderne à donner à la Charte qui commence par les mots "Nous, peuples des Nations Unies...". Au-delà du rôle consultatif dont disposent déjà les ONG, il faut rendre opérationnel l’accès de la société civile aux décisions élaborées par les instances intergouvernementales, en prenant exemple sur le tripartisme : Etat, employeurs, salariés, qui existe depuis 1919 dans l’Organisation Internationale du Travail.

En savoir + : La Charte des Nations Unies.