L’utopie créatrice du droit à communiquer

9  septembre 2004 | par Valérie Peugeot

L’article 19 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme spécifie que "tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit". Ce texte serait-il en train de passer du statut de bonne intention à celui d’utopie réaliste ? A observer la force avec laquelle les grands groupes médiatiques et les gouvernements à la démocratie douteuse ont combattu l’idée du "droit à communiquer" dans le cadre du SMSI - sommet mondial de la société de l’information - on pourrait commencer à y croire. Le moment est paradoxal : alors que le mouvement capitalistique dans les grands médias traditionnels ne cesse de s’accentuer, la multiplication des outils de médias distribués et participatifs, notamment sur Internet, bouleverse la donne. Le fait que chaque citoyen dispose potentiellement de la capacité à faire entendre sa voix et à contribuer activement à enrichir l’espace public ouvre une brèche dans le monopole économique, politique et surtout symbolique de la parole. Certains conçoivent ces nouvelles technologies coopératives comme des outils de lutte politique à part entière, au service des mouvements sociaux, à l’instar de Samizdat. Pour d’autres il s’agit plutôt de faire émerger une culture de "l’écrit public", comme s’y efforce avec persévérance la ville de Brest. L’enjeu est clairement culturel et politique : comment accompagner nos concitoyens dans cet apprentissage, non pas uniquement des outils, mais de la prise de parole publique, individuelle ou collective ? Comment éviter que cette formidable ouverture ne soit confisquée par quelques uns, les "diseurs" et restituée aux "faiseurs"(1) ? Comment mobiliser ces techniques au service d’une démocratie inter(cré)ative ?

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